AINSI QUE TOUS LES HOMMES
(NAPLES/TUNIS/SKOPJE)
Il n’est pas commun de se sentir appartenir à plusieurs villes du monde. Bernardo a beau être archéologue napolitain, il se sent profondément tunisois, parce que natif de cette ville, et qu’il s’y rend, missionné par sa famille, pour retrouver les traces de son grand-père disparu sans laisser de traces. Le Musée du Bardo vient d’être la cible d’un attentat terroriste. C’est une plongée dans l’histoire de ces sicilo-italiens installés depuis des siècles en Tunisie, et dont certains, comme son grand père, ont pris le parti de l’indépendance de ce pays. Elle le conduit à découvrir les méandres de l’archéologie tunisienne, dominée par l’instrumentalisation politique des patrimoines, et parfois par des stratégies de prédation et de destruction d’un site comme Carthage. Naples n’est jamais loin, jumelle de Tunis. Mais Bernardo est aussi hanté par le sort d’un groupe de jeunes pakistanais assassinés à Skopje, dont il reconstitue les vies et itinéraires, en un hommage rageur et tardif, retrouvant la trace des responsables de leur exécution, avec l’aide de Roms de cette ville aussi obsédés que lui par la recherche de la vérité.
Hocine Tandjaoui, écrivain vivant à Paris, a déjà publié :
- Les Jours Lents (Leo Scheer 2003),
- La Bande Noire dans l’Ombre (108 Édition, 2016),
- Clameur (108 Édition, 2017).
#Maghreb #méditerranée #Naples #Tunis #Skopje
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Les oubliés
Me voilà au milieu du bric-à-brac d’un fond de cale de luxe, avec le sentiment de dérouler la plus antique des traversées, désormais boatpeoplienne, hantée de bateaux pneumatiques trafiqués et surchargés sur l’immensité bleue dissolvant la pierre, la faune et la flore, tout comme les corps humains bercés, livrés/avalés.
Cette voix est celle de Bernardo. Il revient de Tunis, où il s’est rendu pour enquêter sur la disparition de son grand père. Nous sommes à la fin du livre et ce natif de Tunis sait que les choses ne seront plus jamais comme avant.
Le bateau avance dans une mer en désordre, désormais sans repères. Bernardo a le sentiment d’être dans un monde «sans ciel, sans lumière, sans azur, comme au fond d’une grotte ». Il était venu de Naples, pour lever le voile sur une partie de son histoire, il sait maintenant le sort qu’a connu son grand-père.
Mais il n’y a pas que cette histoire, si personnelle et terrible, qui lui importait. Une autre énigme le travaille depuis longtemps. Il est hanté par la disparition de jeunes pakistanais tués dans une vigne près de Skopje, par les miliciens de l’infâme Ljube Boskoski, en 2002, qui les décrira comme des soldats d’Al Qaeda qui avaient l’intention d’attaquer des ambassades occidentales. (Le diabolique Boskoski, qui espérait que ce scénario lui assurerait de belles retombées, réussira à passer entre les mailles du TPI !).
Bernardo veut savoir -il a besoin de savoir- qui sont ces « hommes parmi les hommes, des êtres humains mus par l’instinct de survie, par l’énergie vitale, ainsi que tous les hommes ».
Les deux histoires, celle de son grand-père et celle de ces jeunes pakistanais sont intimement liées, dans sa tête. Il a décidé d’aller jusqu’au bout. Et rien ne saura l’en détourner. Il ne connaîtra la paix que lorsqu’il saura ce que les uns et les autres sont devenus. Son grand-père, Tomasso, ainsi que Muhammed, Omar, Syed, Hussein, Asif, Khalid et un septième homme dont jamais personne ne saura préciser l’identité.
En archéologue obstiné, il se livre à une fouille en règle. Il traverse des pays et des mémoires qui en savent long là-dessus. Les Balkans mais aussi Carthage. Où d’insignes tragédies reposent dans de somptueux décors.
Il remontera jusqu’à Livio, le père de son grand-père, qui a acheté un terrain à Tunis à la mission archéologique américaine de Prorok. Ce qu’il découvrira mettra sa vie en péril. Car on ne fouille pas impunément dans le passé et le présent. On ne fouille pas dans ce que d’aucuns considèrent comme leur linge privé. Mais Bernardo n’en a cure. Sa condition d’homme est à ce prix. Et sa liberté aussi. Il s’est battu et il se battra. Il ne rangera les armes que lorsqu’il fera toute la lumière sur son histoire et qu’il pourra alors se dire, comme il le dit, en pensées, à son grand père, mort depuis longtemps : « Tu es enfin libre, rejoignant des égaux recherchant l’oubli, des oubliés de toujours ».
Son grand-père lui aura permis d’ouvrir les yeux sur le monde, en lui permettant de mettre au centre de ses pensées, un groupe de sept hommes, anonymes et pauvres, qui n’avaient commis que le crime de rêver d’une vie meilleure.
L’écriture est sobre. Précise Pour nous tenir au plus près d’une voix intérieure et nous faire entendre autant que voir les méandres tourmentées d’une âme désireuse de trouver le nécessaire répit pour affronter les jours à venir.
« Ainsi que tous les hommes » est une œuvre qui reconnait comme sienne la complexité du monde. Il y souffle un vent d’une grande fraternité.
C’est une réflexion sur les destins croisés des hommes. Sur la part des autres que nous portons en nous. Cette part lumineuse qui fait de la vie une si belle aventure. Celle qui nous indique « la voie du risque, de la découverte et de la connaissance », pour que nous méritions notre destin d’hommes.
K.M. Ammi
Ainsi que tous les hommes de Hocine Tandjaoui, 108 Edition, Paris 2021, 253 pages.
Histoire d’un texte :
A force de chercher, j’ai fini, bien tardivement, par trouver les mots – mais est-ce vraiment les bons- pour expliquer mon amour immodéré pour la musique, qui fait de moi un être en permanence entouré de sons et de voix, musiques et voix obsédantes, possessives, exclusives, faisant rarement place au silence. A force de m’interroger sur l’origine de cette addiction, il a bien fallu que j’aille au tréfonds des souvenirs pour y trouver une enfance faite de bruit et de fureur, avec l’omniprésence de la grande histoire revêtue de son uniforme d’autodestruction, de la mort et de la destruction, et des haut-parleurs livrés à une guerre polyphonique. Clameur du monde comme offrande après tout car elle fut la respiration et la fin des entraves.
Parution : 2017
Prix : 5 euros
Pages : 48 pages
Format : 100X190 mm
ISBN : 979-10-95584-01-8
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Les bonnes feuilles
« Tu te contiens, te contiens, ton corps n’est plus qu’une grenade prête à exploser, et enfin tu t’éjectes, dévales les escaliers et t’éloignes à toutes jambes aussi loin que possible du giron familial. Là, loin, loin de tous, tu hurles ta douleur, tu deviens l’enfant hurlant sa douleur, l’enfant qui crie, l’enfant hors de lui. Il a fallu que tu sois dehors, que tu trouves ton hors-là, ton désert, ailleurs, que ton espace désormais soit le hors. Hors jeu. Tu t’es éjecté du cercle, de la règle. Tu ne partages pas ta douleur… »
« Est-ce le miracle de la musique, ou faut-il dire celui de la voix humaine, la voix chantée, est-ce donc ce miracle qui fait qu’un chant, un ensemble de notes, puisse frapper une personne, de façon si juste, si précise, qu’elle en est à ce point bouleversée, qu’elle restera définitivement bouleversée sa vie durant, par ce chant-là, avec la même intensité que la première fois? »
« Longtemps tu as pensé avoir découvert la musique grâce au fond sonore de cette rue-lupanar, avec le reste de ce qu’il y avait à apprendre et découvrir, grâce aux haut-parleurs poussés à fond des cinq cafés-brasseries…qui te dit que tu ne les entendais pas in utero, qui te dit qu’avant même ton premier souffle, tu n’en étais pas déjà imprégné ? Oui, forcément, tu étais déjà relié au monde avant de naître. L’utérus bénédiction, béni dans la plus belle des chambres d’enregistrement, le corps de ta mère, béni par un fleuve majestueux de sons et de voix. La musique et les voix t’auront mis au monde avant même que tu naisses, c’est ça ton secret : une éducation musicale intra-utérine, avant même que tes oreilles ne se forment, un héritage avant même d’exister.
« Ce bus, c’est une véritable arche moderne, que seul le siècle dernier a pu produire. »
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4 août 2002, centre-nord de la Galilée. Le bus 361, qui relie le port de Haïfa à Safed, explosera dans peu de temps… Énième attentat-suicide, ce drame est éclipsé par le suivant, ici ou ailleurs,
et bascule dans l’oubli. Sortir les passagers de l’anonymat, de l’ombre dans laquelle la noirceur de l’histoire les fait reculer – voilà la tentative de ce magnifique roman.
Ce bus, c’est une véritable arche moderne, que seul le siècle dernier a pu produire. Ses passagers, perdus dans leurs pensées, forment un entrelacs d’identités multiples, pluriculturelles et
complexes : un juif dogon, une immigrée marocaine, un médecin officier de réserve, une Copte militant dans une organisation des droits de l’homme… Le dernier passager à prendre place est celui
sans lequel cet autobus et ses passagers nous seraient inconnus, un jeune Palestinien originaire de Cisjordanie, ouvrier agricole, désespéré, enrôlé par les partisans de la terreur, fou de dieu
et semeur de mort.
Dans le flux des pensées des voyageurs, un fil émerge et nous emmène à Paris, comme un écho, qui, dans un continuum historique, est le siège d’une autre violence : le meurtre d’un faiseur de paix
dans une cité HLM du 19e arrondissement.
Perle d’écriture, ce texte veut restituer la complexité des identités multiples, la réalité des brassages de cultures, leur infinie richesse, au-delà de la violence propre de ces faits
historiques traversés. Il confronte les hommes à leur responsabilité et à leur capacité de créer ou détruire, dans une histoire en chaos.
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Les bonnes feuilles
"Si cet événement prend sens pour moi, c’est parce qu’il me lance un défi de langage et d’écriture, au-delà de l’immédiateté et de la véracité. Leurs visages me suffisent.
La diaspora n’explique rien de nos destinées. Beaucoup de diasporiques se prétendent indemnes de tout mélange, d’autres assument joyeusement tous les croisements. Notre histoire est faite de
choix et de hasards. Que je me définisse comme dogon pour une part tient à l’arrivée d’un frère adopté, à la cupidité d’une marchande d’art, ma grand-mère Malka, à la colonisation, à l’inévitable
cohorte de rapaces qui la peuplent, à la découverte de l’art africain, à l’amour fou d’une mère, tout ça inextricablement mêlé, de telle sorte que l’on ne peut absolument pas déterminer quel bout
de ficelle permet de démêler la pelote. Cette histoire me prédispose à ne jamais m’identifier au colon s’emparant des terres par la force et justifiant sa cause par l’histoire de l’Antiquité, ou
par de meilleures compétences à valoriser la terre."
La Bande noire dans l’ombre, extrait de la page 14
"Vol de nuit vers Paris. Tranchées d’abîmes noirs d’hiver. Retour à la carte. Le losange parfait est aussi éphémère qu’une pensée. Laissez tomber la carte et la règle. C’est un rêve de
caboteur phénicien. De corsaire barbaresque écumant le plus grand carrefour commercial du monde. Devant la mer de Chine sûrement. La piraterie est forcément née ici. Où aurait-elle pu naître
?"
La Bande noire dans l’ombre, extrait de la page 28
"La mère de la victime se tient droite sur son banc. Elle a renoncé à capter leur regard. Elle regarde fixement droit devant elle. Les jurés ne cessent d’épier ses réactions. Visage d’un être
détruit. Elle est tout entière à sa douleur. Impitoyable sociologie : les enfants des loges de concierge et des chambres de bonne, meurtriers de l’enfant unique d’une employée de la Sécurité
sociale. La guerre des plus pauvres aux moins pauvres, aux limites du faubourg."
La Bande noire dans l’ombre, extrait de la page 88
108 Édition
4, impasse de Joinville
75019 PARIS
108edition@gmail.com
C'est une sorte de poème épique, dans une belle prose, rythmée, incantatoire parfois, envoûtante souvent. Elle dit une guerre singulière, celle d'Algérie, mais aussi toutes les guerres
coloniales, et celles de l'Antiquité : en un mot, LA guerre, son éternité sur Terre. "Les guerriers s'affrontent dans un champ de bataille en forme de giron poli, érodé, lissé par le temps. Les
femmes occupent les crêtes pour rendre la douleur encore plus proche du ciel. Elles chantent la guerre avant le combat. Silhouettes ramassées,
incertaines, se pétrifiant au fur et à mesure que le sang coule. Impuissantes devant l'irréversible." Un irréversible qui se perpétue, même si, à chaque fois, on pense que cette guerre, jugée
nécessaire, pourrait être la dernière. Avec des arguments semblables, depuis "la défense de Rome" jusqu'à l'époque contemporaine. "Un commandement militaire en temps de guerre n'est pas un espace
de réflexion. Il ne fonctionne qu'à l'obéissance et à l'application stricte des règles."
Ed. Léo Scheer, 118 p., 15 €.
Josyane Savigneau
Hocine Tandjaoui est né en Algérie en 1949. Après avoir travaillé dans le journalisme et le théâtre (il est administrateur du Théâtre de la Mer à Alger), il publie ses premiers textes dans la revue Souffles. Depuis les années 70, il mène une carrière d'expert en développement, en France et à l'international, et, dans le même temps, de poète et d'écrivain. Publications : Le Temps de nous-mêmes, éditions Saint-Germain-des-Prés, Paris, 1973; Chants arénaires, inédit, Paris, 1978 ; Les Jours lents, éditions Léo Scheer, Paris, 2003.
Ainsi que tous les hommes - dernier ouvrage de Hocine Tandjaoui paru chez 108 Édition